Double champion du monde (1995, 2001), élu meilleur ailier droit français de tous les temps en 2002, « Greg » a tout gagné avec le MHB (1 Ligue des Champions, 9 titres de champion de France, 6 Coupe de France, 4 Coupe de la Ligue). En ces jours anniversaires, alors que l'on célèbre les 40 ans du club et les 20 ans du premier sacre en Ligue des Champions, Gregory Anquetil évoque ses souvenirs. Ce soir du 4 mai 2003, il s'agissait pour lui du point culminant de sa carrière.
Greg, 20 ans après la victoire en Ligue des Champions, quels sont tes souvenirs de ce moment fort de l’histoire du club ?
C’est la semaine entière qui m’a marqué. Nous sommes passés par tout ce qui était possible et imaginable. Au match aller, on s’est raté, excepté Nikola (Karabatic) qui nous sauve d’une défaite plus prononcée. Il a fallu nous reconstruire durant une semaine, faire ce qu’il fallait pour être prêts mentalement pour le retour. En sept jours, il fallait passer de l’ombre à la lumière. Et surtout, se débrouiller pour y croire encore !
Cette semaine-là, nous avons fait la séance vidéo la plus importante de notre vie. En sortant de la pièce, on s’est tous dit « Ça peut le faire ! ». On s’est regardé en se disant : « On a rendu cette copie là à l’aller, on peut faire bien mieux, il y a moyen de faire un coup ».
Le matin du match retour, pendant le réveil musculaire au Grau du Roi, je n’étais pas sûr qu’on allait soulever le trophée, mais je pensais vraiment qu’on allait gagner le match, j’étais certain que ça allait être très dur pour eux. Quand j’ai vu le regard de tout le monde au petit déjeuner… A la limite, l’échauffement ne servait plus à rien, on était déjà en conditions le matin à 8h00 !
Pour ce match retour, Patrice Canayer disait qu’il avait davantage misé sur la folie et l’insouciance de la jeunesse, que sur le talent et l’expérience des cadres. Où te situais-tu toi en 2003 ?
J’avais 32 ans à ce moment-là, j’ai toujours eu l’insouciance et la folie jusqu’à la fin de ma carrière. J’ai toujours eu un grave défaut et une énorme qualité, c’est que j’ai toujours pensé que mon équipe était meilleure que celle des autres. Cela m’a toujours permis de ne jamais avoir peur, et de jouer ce match en se disant que c’était possible. J’étais persuadé qu’on allait gagner au retour.
Est-ce que le 4 mai 2003 est une date qui a changé ta vie ?
Clairement oui, personnellement c’est le match le plus important de ma vie. J’accorde plus d’importance à la Ligue des Champions qu’à un titre de Champion du monde. Je suis arrivé en 1989 en deuxième division et il m’a fallu 14 ans pour gagner la Ligue des Champions, alors que pour mon premier titre de Champion du monde en 1995, j’avais 13 sélections. C’est pour moi le plus gros exploit de ma carrière de joueur. C’est une date qui a changé ma vie. Cela apporte moins de retombées qu’un titre de Champion du monde mais dans ma hiérarchie, c’est mon trophée numéro 1.
Te souviens-tu de la soirée qui a suivi ?
Nous sommes allés au théâtre sur la Place de la Comédie et avec les supporters c’était un truc de fou furieux, c’était vraiment incroyable ! Ensuite, je me souviens surtout que nous étions tous épuisés, et que nous devions aller jouer à Chambéry le mardi soir suivant. Pour la soirée après la Comédie, il n’y avait plus d’essence dans le moteur !
Aujourd’hui, que représente le Montpellier Handball à tes yeux ?
Aujourd’hui, je peux dire que le Montpellier Handball a fait ma vie. Je suis né en Normandie, j’ai fait 2 clubs dans ma vie. J’ai appris à jouer au hand ailleurs et puis j’ai fait ma vie à Montpellier grâce au handball. Je vis toujours dans la région. J'ai moins de temps pour suivre assidûment les matchs du MHB car comme je travaille à la télévision, je dois regarder également d’autres équipes. Par rapport à l’évolution du handball, je ne suis pas nostalgique et je ne regrette pas d’avoir joué à cette époque, j’ai l’impression d’avoir été au bon moment au bon endroit.
As-tu gardé des contacts avec l’équipe de l’époque ?
J’ai gardé davantage de contacts avec Andrej (Golić) et Laurent (Puigségur), parce qu’ils sont restés sur Montpellier. Il y a mon frère bien sûr. J’ai moins de contacts avec Michael (Guigou), Nikola (Karabatic) et Titi (Omeyer) parce qu’ils ont vécu une autre histoire ailleurs après. Je vois beaucoup Alain Carmand et je prends toujours autant de plaisir à voir Patrice (Canayer). On a vécu tellement de choses exceptionnelles. Il s’est passé tellement de choses entre 1989 et 2007 que pour moi, ces gens là sont ancrés dans ma vie.
Pour l’année de ses 40 ans et des 20 ans du sacre de la Ligue des Champions, le MHB est encore en course pour gagner l’European League et la Coupe de France, c’est un joli clin d’œil…
C’est à ça que l’on reconnait un grand club. Ce n’est pas forcément d’avoir gagné plus de 10 Ligue des Champions comme Barcelone, c’est plutôt de se dire qu’entre 1995 avec le premier titre de champion de France, et aujourd’hui, Montpellier fait toujours des finales. Un grand club, c’est un club qui fait partie des 10 meilleurs au monde sur 30 ans ou 40 ans d’existence. C’est pour cela qu’à mon sens, Montpellier est un très grand club.
As-tu un message à adresser à l’équipe actuelle ?
Je n’ai aucun conseil sportif à leur donner, la seule chose que je peux leur dire c’est de profiter de l’instant, parce-que c’est tellement rare ! Il y a des joueurs tellement monstrueux qui n’ont jamais réussi à jouer une finale… Quand on peut en jouer une, il faut tout prendre. Un Final 4 de Coupe d’Europe, c’est l’aboutissement d’une vie.